Xavier Bertrand incitait le 3 novembre lors de la première convention des Rendez-vous pour la France à "une mobilisation totale de la nation…si tout commence par l’éducation, tout doit commencer aussi par la maîtrise des savoirs fondamentaux". Vincent Peillon, présent le 20 novembre lors d’un colloque pour l’Egalité Réelle sur la réduction des inégalités à l’école, renchérissait : "La refondation républicaine de l’école devait guider le projet du parti socialiste pour 2012". Chacun s’accorde donc sur l’importance de l’éducation dans le projet électoral. Quelles sont les idées ? 

Entre réforme complète ou poursuite de la politique actuelle du gouvernement, le PS et l’UMP recentrent surtout leur attention sur l’école primaire et le collège et la revalorisation des principes de l’école républicaine.

Comment réduire les inégalités à l’école ? 

 

Cette question a été posée lors d’un colloque à l’Ecole Normale Supérieure organisé par la section PS de l'ENS où sont intervenus Patrick Clastres agrégé d’histoire et animateur du groupe "Education, savoirs et Emancipation" du Laboratoire des idées, Frédérique Rollet , secrétaire général et porte parole du SNES animé par Laurent Touuzet secrétaire fédéral PS Paris à l’éducation. Le débat organisé par la section PS de l’ENS Um reprenait autour de deux tables rondes : "comment réduire les inégalités sociales à l'école" et  "l'école peut-elle ne plus contribuer aux inégalités sociales «, les idées déjà présentes dans le récent rapport sur l’éducation du Laboratoire des idées.

 

En octobre 2010 Bruno Julliard, Secrétaire National à l’éducation du PS révélait au journal Le Monde les prémisses du projet socialiste sur l’éducation à travers le projet "Education et formation pour l’égalité". Le programme se fonde sur la réforme de la carte scolaire en vue d’assurer une plus grande diversité sociale et "briser les ghettos de riches et de pauvres". Cette réforme concernerait aussi les établissements privés afin d’assurer au mieux une diversité et endiguer l’essor du privé qui est considéré comme le symptôme de l’échec de l’égalité au sein du public. Le projet ne viserait donc pas à supprimer la carte scolaire mais à refaire les modes d’affectations. Présenté dans un programme d’une quarantaine de pages disponible sur le site du PS, le projet propose aussi une refonte du système scolaire autour de thèmes comme la revalorisation de l’enseignant, la réorganisation du temps scolaire et la question de l‘évaluation des compétences. Il s’inspire directement de deux rapports écrits en juin par le Laboratoire des idées, l’un portant sur le "collège pour tous " et l’autre sur "Une politique éducative territoriale pour l’égalité réelle". Ce travail sur un an, a réuni divers chercheurs, spécialistes et personnels éducatifs.

 

Le temps scolaire, nouvelle donne 

Lors du débat du samedi 20 novembre à l’ENS-Ulm le problème de l’emploi du temps de l'élève a été évoqué. Face à la surcharge des devoirs à la maison, la proposition serait de faire entrer ce temps de travail, équivalent aux heures d’études, dans l’emploi du temps de l’élève. L’idée serait aussi d’augmenter le nombre d’heure de loisirs et de travaux en groupe afin d’alléger la journée, le tout encadré par une présence adulte jusqu’à 18h afin que l’enfant soit déchargé de tout travail scolaire en rentrant chez lui. Le projet mené par Bruno Julliard préconise aussi moins de jours de vacances d'été  au profit de plus de loisirs pendant les semaines de cours. Une question perdure dans ce projet : quelle va être l’autonomie de l’enfant dans l’apprentissage de méthodes de travail ? Si celui-ci est sans cesse encadré, comment peut-il être préparé au lycée ou il sera beaucoup plus livré à lui-même ? Le rapport du Lab des idées stipule que ce suivi n’aurait lieu qu’en 6ème et 5ème afin d’aider au  mieux l’adolescent dans ses premières années de lycée. 

 

Se recentrer sur le collège et l’acquisition des savoirs fondamentaux

 

L’UMP a aussi fait de l’éducation son cheval de bataille : Le site du Mouvement Populaire  y voit le "symbole du nouveau cycle de travail de l’UMP" et organise le débat du mois autour de l’éducation. Lors de la convention des premiers Rendez-vous pour la France, qui se tenait le 3 novembre, le débat portait sur tout "Tout commence par l’éducation" autour de trois principes directeurs : la priorité aux savoirs, la valorisation du mérite, le rétablissement de l’autorité avec pour objectif à terme, l’autonomie croissante des établissements. Animé par Nathalie Kosciusco-Morizet et Laurent Wauqiez, les discussions se sont aussi focalisées sur le primaire et le collège.  Alarmé par le pourcentage d’enfants ne sachant ni lire ni écrire en CE1, Xavier Bertrand  a insisté sur la priorité d’acquérir ces savoirs avec une remobilisation totale sur l’apprentissage de la lecture à l’école primaire. L’échec et le décrochage scolaire faisaient aussi partie des points importants évoqués. A ces problèmes, s’ajoutent celui de la revalorisation de l’enseignant. Sa mise en valeur se ferait à travers le rapport d’autorité qui doit perdurer selon eux entre l’élève et l’enseignant pour assurer une discipline et une écoute. L’idée d’un parcours individualisé selon chaque élève et son rythme a aussi été discutée, celle-ci favoriserait l’adaptation de l’élève et rendrait plus visible les signes d’abandon ou les lacunes et faciliterait son orientation. Les participants au débat ont aussi affirmé leur volonté de relancer des "prépas pros" dès la 4ème afin de revaloriser les filières professionnelles pour les élèves les plus intéressés. De son côté Jean-François Copé, nouveau Secrétaire Général de l’UMP a aussi lancé via son site Génération France  un débat sur l’école primaire et maternelle. Il avait d’ailleurs lancé au début de l’année scolaire l’idée d’un examen dès la 6ème afin de vérifier l’acquis des savoirs avant le collège. 

 
Grands absents des idées : La sécurité à l’école et les moyens  
 

A travers ces débats où les partis se retrouvent et s’opposent, l’idée de revaloriser l’école républicaine est bien perceptible et fait l’objet de programmes ambitieux, deux grands sujets semblent être oubliés : la sécurité à l’école qui a pourtant été l’un des principaux sujets d’actualité de l’année 2009-2010  et à l’origine du mécontentement de nombreux enseignants. La question du financement de ces "refontes en profondeur" du système scolaire semble aussi être évacuée. Pour les Jeunes populaires il s’agit d’une posture assumée comme on peut le lire sur leur site "Relever le défi d’une école qui soit de nouveau le pilier de l’égalité républicaine ne peut donc se résumer à des cliches ni à des querelles idéologiques comme la question des moyens. La cour des comptes l’a écrit. Il est faux que l’école manque de moyens". Quant au PS, le financement est seulement évoqué dans l’idée de redonner les postes supprimés par le gouvernement.  Il semble que les deux partis privilégient certains aspects en commun. L’importance de suivre l’enfant depuis le jardin d’enfant jusqu’à ses débuts de carrière est une préoccupation conjointe aux deux partis, de même que la question de l’autonomie des établissements. Le jeudi 9 décembre, Michèle Tabarot (Députée UMP) est revenue sur la mission parlementaire consacrée au raccourcissement des vacances scolaires   , idée qui semble faire consensus entre PS et UMP. A l’heure où l’Institut Montaigne publie une étude du PISA (Programme International pour le Suivi des Acquis des élèves)  qui étudie les performances du système éducatif français sur une décennie,  la "guerre des idées " entre les partis comme le titrait Les Inrockuptibles semble être bien lancée. Reste à savoir ce que garderont les candidats de ces projets lors du lancement de leurs campagnes

 

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