Une description des outils pour maintenir la productivité des entreprises grâce aux compétences, connaissances ou réseaux des salariés. Pure  théorie.

Les deux auteurs, deux consultants du cabinet de conseil en stratégie McKinsey & Company, partent d’un constat simple : plus une entreprise est importante (en termes de nombre de salariés) plus elle est difficile à gérer et plus la productivité par employé est faible.

Ce constat effectué à partir d’études quantitatives, dont les résultats nous sont présentés dans l’introduction de l’ouvrage, met en évidence des entreprises (IBM, Microsoft, General Electric) qui ne rencontrent pas ce phénomène de diminution de la productivité par employé au fur et à mesure de leur développement.


Mobiliser toutes les ressources des salariés

Selon Mc Cullan et Joyce, les entreprises ayant su rompre la corrélation négative entre développement et diminution de la productivité par employé sont celles qui ont mis à profit les actifs incorporels de leurs salariés. Il faut entendre par actifs incorporels tous les éléments qui ne font pas nécessairement partie du CV d’un salarié mais qui aide celui-ci dans son travail quotidien au sein de la très grande entreprise. Les auteurs citent comme exemple, les réseaux internes et externes, les connaissances et les compétences acquises sur des sujets spécifiques à l’entreprise, etc.

La première partie du livre nous permet de souligner l’inadaptation au monde économique actuel des grandes entreprises organisées comme celles du XXème siècle   .

La deuxième partie du livre nous présente neuf pistes de réflexion qui peuvent aider l’entreprise à tirer profit des opportunités de gains qu’elle possède mais qu’elle ignore. Ces opportunités reposent surtout sur la mobilisation des actifs incorporels de ces cadres et employés, d’où son titre original "mobilizing minds".

Les neufs pistes de réflexion présentées dans cette seconde partie sont organisées en trois axes.

Le premier axe concerne l’organisation hiérarchique de l’entreprise. Les auteurs mettent en évidence la nécessité de repenser la pyramide des responsabilités afin de l’orienter vers la performance en soutenant les initiatives des salariés, en développant des partenariats constructifs et en créant un encadrement dynamique acceptant que les idées puissent venir des salariés.

Le second axe détaille les outils à installer pour faciliter la création et la circulation des informations et des connaissances au sein des grandes entreprises. Les auteurs introduisent alors les notions de gestion de la connaissance, de place de marchés des compétences et des connaissances.

Le dernier axe traite des moyens à mettre en œuvre pour favoriser la mise en place des deux premiers axes : les gratifications et les évaluations sur des critères favorisant la mobilisation des actifs incorporels des salariés.


Un manque d'exemples

À la lecture de l’introduction, on pouvait s’attendre à trouver une compilation de bonnes pratiques s’appuyant sur des cas concrets étudiés et détaillés par deux consultants, ce n’est pas le cas. Afin d’obtenir une cohérence des différentes parties de cet ouvrage les auteurs ont utilisé un seul et unique exemple (d’une très grande complexité) : la Global Bank. Cette banque imaginaire, rencontre tous les problèmes liés à sa croissance et utilise les méthodes préconisées par les deux consultants. Bien évidemment, dans ce contexte, les préconisations fonctionnent parfaitement.

Les auteurs citent tout de même quelques entreprises et détaillent quelques données quantitatives qui nous permettent d’étudier les sociétés qui ont su maintenir, voire augmenter, leur productivité par salarié tout en se développant. Ces entreprises évoluent surtout dans le secteur pétrolier (Chevron, Total). Les auteurs ne précisent pas si les données étudiées sont corrigées des effets liés à la hausse du prix du pétrole, non imputable à la mobilisation des compétences, talents ou réseaux des salariés.

Certaines sociétés sont citées pour leur complexité du fait du nombre de leurs salariés et de leurs activités. Cependant, certaines des sociétés choisies sont connues pour être les championnes de la réduction des coûts. Ainsi, elles ne mettent pas nécessairement en place une nouvelle organisation laissant plus d’autonomie au salarié pour qu’il soit plus créatif et qu’il partage ses réflexions.

Par ailleurs, il est possible de s’interroger sur la faisabilité pratique des recommandations exposées. Les auteurs nous expliquent qu’il faut tirer profit de la révolution numérique pour mettre en place des outils de travail collaboratif permettant le partage de la connaissance au sein des entreprises   . Cependant, depuis le lancement de ces outils peu d’avancées ont été constatées. Les données mises en lignes ne sont pas toujours mises à jour et la tradition orale se perpétue même dans les très grandes entreprises. Les salariés propriétaires d’une connaissance ou d’un savoir-faire spécifiques peuvent se sentir détenteurs d’un avantage comparatif sur les autres salariés et ainsi ne pas être enclins à partager cette connaissance. Enfin, les contraintes de coûts liés à la mise en place d’outils de gestion des compétences et des connaissances n’ont pas été abordées.

Deux aspects de cet ouvrage méritent cependant que l’on s’y attarde. Le premier concerne les fiches de synthèse très utiles qui sont présentées dans les différents chapitres et qui font le point sur des notions spécifiques (entreprise-pédia, coûts de transaction, information et connaissance, etc.). Le second aspect concerne le chapitre traitant des réseaux internes aux entreprises. Ce chapitre trouve un écho tout particulier avec le développement actuel des réseaux sociaux sur Internet.

Cet ouvrage ne doit être consulté que pour sa partie théorique, l’exemple de la Global Bank n’étant qu’une illustration sans fondement pratique. Ce livre ne sera pas le vade-mecum de la transition des très grandes entreprises pour faire face aux défis du XXIème siècle.