Début 2009, plusieurs membres du Parti socialiste, notamment du cabinet de Martine Aubry, évoquent l’idée de construire un "réseau social" pour les militants et sympathisants du PS ; ce sera la Coopol (coopérative politique), "le réseau social de toutes celles et de tous ceux qui veulent débattre et agir à gauche !". Ouvert au public en janvier 2010, le site a été conçu par la Netscouade avec un budget initial de 300 000 euros.

L’influence de la campagne américaine et de la façon dont Barack Obama a réussi à utiliser Internet pour diffuser ses idées et rassembler ses électeurs ne sont sans doute par pour rien dans l’émergence de la Coopol et des Créateurs de possibles, réseau social de l’UMP lancé trois jours avant celui du PS, et destiné aux "citoyens en action". Cependant, à la différence des États-Unis, le Parti socialiste est constitué de fédérations et de sections présentes sur tout le territoire et pas uniquement en période de campagne électorale. L’utilisation du web n’est donc pas nécessaire uniquement pour rassembler et unifier les militants ; c’est un outil utile pour organiser la mobilisation, des débats de fonds et des manifestations ponctuelles et territorialisées, et bien sûr diffuser directement et massivement des informations sur les événements et les débats organisés par le parti, au niveau national comme au niveau local.

 

"Un outil au service du terrain"

Pour Valério Motta, responsable web du PS, la Coopol est devenue le "premier réseau social politique en France". Avec 26 000 membres aujourd’hui, cinq mois après son lancement auprès du grand public, il est toutefois difficile d’établir un bilan. Cet ancien secrétaire national des MJS   voit avant tout la Coopol comme "un outil au service du terrain" et la réflexion menée en interne a conduit à l’idée d’ "intégrer une structure existante", celle du PS. La Coopol se distingue des Créateurs de possible, réseau qui s’intéresse davantage au débat et moins à l’organisation militante   .

Le fonctionnement de la Coopol ressemble à celui de Facebook : publication de posts, organisation d’événements, messagerie, etc. Mais il existe aussi des applications qui ne sont accessibles que pour les adhérents du PS, d’autres uniquement pour les secrétaires régionaux. Les gestionnaires du réseau ont ainsi mis en place un système de cartographie qui permet aux militants de croiser les données socio-économiques de l’INSEE (âge, CSP   , secteur d’activité) et les résultats par bureau de vote. Si cet instrument, inédit selon Valério Motta, permet une compréhension sociologique du terrain très fine, il est cependant utilisé dans un but électoraliste : les militants peuvent ainsi savoir où il y a de fort taux de chômage ou de retraités et "cibler" la distribution de tracts. Cet instrument a déjà été utilisé par plusieurs sections du PS pour les régionales, notamment entre les deux tours.

Le réseau est en constante évolution pour combler ses lacunes et s’adapter aux demandes de ses utilisateurs. Le terme "coopain" par exemple a suscité de nombreux débats. Certains lui auraient préféré le terme traditionnel de "camarade" et d’autres déplorent l’absence d’un équivalent féminin "coopine". La suppression du "mademoiselle" dans le formulaire de présentation a déjà été un pas vers une certaine égalité homme-femme car elle permet d’ignorer les statuts maritaux pour les hommes comme pour les femmes.

 

Quel avenir ?

L’objectif de la Coopol, selon Valério Motta, est de mettre en réseau des personnes travaillant sur le même sujet mais ne vivant pas dans la même région. Grâce à cet outil, les débats sont ouverts et tous les membres du réseau peuvent participer. Leurs avis sont ensuite étudiés et repris dans les discussions des organes de direction du parti. Ainsi, pour la préparation de la "Convention nationale pour un Nouveau modèle de développement économique, social et écologique", le travail de réflexion s’est fait en plusieurs temps, en intégrant les contributions des Coopains. Est-ce le retour de la "démocratie participative" utilisée par Ségolène Royal avec son site Désirs d’avenir lors de la campagne de 2007 ? Pour Valério Motta, ce terme a été un peu galvaudé, et il préfère décrire le fonctionnement de la Coopol selon une "idée d’horizontalité". Les militants fidèles du parti socialiste semblent se faire à cette idée puisqu'ils se servent assez largement de l'outil à leur disposition pour organiser débats et manifestations politiques. Néanmoins, il reste à démontrer que la Coopol sera le réseau indispensable capable de rassembler tous les sympathisants de gauche en vue des présidentielles de 2012

 

*Lire le dossier complet de nonfiction sur le numérique