* La publication de cet article vient consacrer le lancement du nouveau pôle Droits fondamentaux de nonfiction.fr, qui sera animé par Aurore Lambert.

 

Les dispositions  interdisant de "se prévaloir d’un préjudice du seul fait de sa naissance" pourraient porter atteinte au principe de responsabilité inscrit dans la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen.


L’article 61-1 de la Constitution, entré en vigueur le 1er mars 2010 à la suite de la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008,  permet au Conseil d’Etat ou à la Cour de Cassation, saisis d’une affaire au fond, de poser une "question prioritaire de constitutionnalité" au Conseil Constitutionnel, si une disposition législative est susceptible de porter atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution. Le Conseil Constitutionnel a été saisi le 14 avril de ses trois premiers dossiers.


Dans le cas qui nous intéresse, Mme Viviane L. avait déposé une requête auprès du tribunal administratif de Paris afin d’obtenir réparation du "préjudice" résultant de la naissance d’un enfant de sexe masculin atteint de la myopathie de Duchenne en raison d’une erreur de diagnostic commise en 1992 à l’hôpital Cochin. Le rejet de cette requête a été confirmé par la cour administrative d’appel de Paris sur le fondement des dispositions des premier et troisième alinéas de l’article L.114-5 du code de l’action sociale et des familles.


Mme Viviane L. s’est pourvue en cassation contre cet arrêt et a demandé à ce que le Conseil Constitutionnel soit saisi d’une question prioritaire de constitutionnalité portant sur les dispositions introduites à l'article L. 114-5 du code de l'action sociale et des familles par le I de l'article 1er de la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades. Ces dispositions interdisent de "se prévaloir d'un préjudice du seul fait de sa naissance" et limitent l'engagement de la responsabilité d'un professionnel ou d'un établissement de santé du fait de la naissance d'un enfant né avec un handicap non décelé pendant la grossesse aux préjudices des seuls parents et si une "faute caractérisée" peut être identifiée. La compensation du handicap relève alors de la solidarité nationale.


Le Conseil d’Etat ayant constaté que ces dispositions n’avaient pas été déclarées conformes à la Constitution par le Conseil constitutionnel et sont par conséquent susceptibles de porter atteinte au "principe de responsabilité" (et donc, de la réparation d’un dommage causé à autrui) qui découle de l’article 4 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, il a sursis à statuer dans l’attente de la décision du Conseil constitutionnel
 

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