Alors que Valérie Pécresse annonce que les négociations qui ont eu lieu avec une partie des syndicats de l'enseignement supérieur ont débouché sur des "avancées", le nouveau projet de décret sur le statut des enseignants-chercheurs n'apporte aucune réponse aux inquiétudes de ceux-ci. Le gouvernement joue la montre alors que l'année universitaire avance en comptant sur le sens de l'intérêt général des universitaires soucieux de la réussite de leurs étudiants. Mais en tentant d'opposer ainsi étudiants et universitaires, le gouvernement se livre à un jeu dangereux qui conduit déjà à une radicalisation du conflit.

Le Premier ministre, François Fillon, avait déclaré le 25 février dernier que le décret statutaire (le décret d'application de la loi LRU réformant le statut des enseignants-chercheurs) devait être entièrement réécrit. Le Président de la République lui-même, dans son style si particulier, aurait déclaré, selon le Canard Enchaîné du 4 mars : "Je ne veux plus voir les enseignants, les chercheurs et les étudiants dans la rue ! (...) Fini le projet de décret (sur les EC). Fini aussi la suppression des IUFM. Vous me réglez tout ça. Vous vous couchez. Je m'en fous de ce que racontent les cons du ministère ! S'il le faut, vous n'avez qu'à faire rédiger les textes par les syndicats, mais qu'on passe à autre chose ! On a bien assez de problèmes comme ça. De toute façon, ce n'étaient que des projets de merde." Bref, chacun pouvait raisonnablement penser que le ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche, Valérie Pécresse, obéirait à ses supérieurs hiérarchiques.

Or il n'en est rien. Le nouveau projet de décret proposé par le ministère après des discussions avec quelques-uns des syndicats (le SNESUP n'a pas participé) n'apporte aucune réponse aux différentes questions fondamentales soulevées par les universitaires depuis qu'ils ont commencé à se mobiliser contre la révision de leur statut - contrairement à ce qu'affiche sur son site le ministère en mettant en avant seulement quelques "principes" . Olivier Beaud, pour l'association Qualité de la Science Française, a décortiqué le nouveau projet et en conclut : "Il ressort de cette analyse que, contrairement à l'opinion qui tend à se répandre depuis quelques jours, le ministère a globalement tenu bon sur ses principes et sur ses objectifs."

Le ministère et le gouvernement tentent de jouer l'épuisement du mouvement au moment où le semestre d'enseignement dans les universités risque d'être compromis et les examens finaux perturbés. Ils comptent ainsi sans doute sur le sens du devoir des universitaires et leur souci de l'intérêt des étudiants pour qu'ils cessent de se mobiliser. Le Collectif pour la Défense de l'Université a réagi, avec toutes les autres organisations qui mobilisent la communauté universitaire, à ce jeu de bonneteau de la part du pouvoir : motion du 14 mars 2009.

La mobilisation continuera donc certainement sous des formes variées tant que le projet de décret n'aura pas été totalement réécrit en fonction des demandes du mouvement des enseignants-chercheurs car comme le rappelle également Olivier Beaud dans sa note précitée : "Il est donc très peu probable que la majorité des universitaires sera convaincue par ce texte qui est censé nous sortir de la crise. (...) il est fini, le temps où l'on faisait prendre aux universitaires des vessies pour des lanternes." On ne saurait mieux dire