Un synthèse complète et ordonnée des écrits musicaux de Jean Cocteau de 1910 à 1963.

Les deux auteurs de ce livre, David Gullentops et Malou Haine, n’en sont pas à leur première collaboration. Tous deux spécialistes de l’œuvre de Jean Cocteau, ils ont dirigé en 2005 un ouvrage collectif Jean Cocteau : textes et musique((édition Mardaga) qui mettait en lumière les riches liens entre l’écrivain et la sphère musicale. L’ambition de la somme présentée cette fois dans la collection Musicologies chez Vrin est de regrouper tous les écrits publics que Jean Cocteau consacra à la musique de 1910 à sa mort en 1963.

 

Cette mise en valeur du caractère protéiforme de l’œuvre de Cocteau témoigne de la multiplicité de ses talents artistiques et culturels tels qu’ils se manifestèrent à partir de 1908. Porté par une curiosité intellectuelle exceptionnelle, il devint critique musical et rédigea quantité d’articles, de préfaces, de commentaires et d’ouvrages — 310 au total, dont 137 se trouvent accompagnés de dessins. Auteur d’une dizaine de chansons, initié au piano lors de sa jeunesse, puis à la batterie, Jean Cocteau a principalement témoigné de son intérêt pour la musique au moyen d’activités particulièrement variées : l’écriture romanesque, la critique musicale, l’accompagnement en tant qu’impresario de spectacles musicaux, la fréquentation assidue du Groupe des Six. Cette appétence culturelle remarquable se retrouve dans son goût pour tous les genres musicaux : la musique classique, la danse, le ballet, la chanson, le répertoire populaire, le jazz, le music-hall.


Les auteurs ont fait le choix de regrouper les écrits de Cocteau en six périodes de 10 ans et de restituer les textes le plus fidèlement possible. Un dispositif de notes d’entrée et de bas de page précise l’édition sélectionnée, apporte des éclairages explicatifs précieux et fournit des précisions sur les contextes artistiques et sur les personnalités variés compte tenu de l’amplitude chronologique du sujet. L’autre richesse de l’ouvrage provient du choix d’y inclure quantité de productions graphiques qui interagissent avec les textes présentés. La sélection offerte livre des portraits de différents genres, des caricatures, des illustrations ou reportages graphiques qui complètent donc avec pertinence le corpus littéraire. Les difficultés inhérentes à un tel travail de récolement (comme la présence de plusieurs versions d’un même texte) ont été surmontées grâce à une méthode d’édition scientifique largement explicitée dans l’introduction.


L’ouvrage qui dépasse les 600 pages apparaît comme un manifeste en faveur de la perméabilité des arts. On y découvre un large panorama de ce que fut le XXe siècle artistique, certes centré sur l’exemple français. Une galerie de personnages peuple ce paysage sonore qui s’étend de Maurice Ravel à Charles Trenet, d’Igor Stravinski à Édith Piaf. Rassembler en un même volume les écrits musicaux de Jean Cocteau rappelle combien il est aujourd’hui précieux d’examiner telle forme artistique par une autre. Cet encouragement heuristique démontre rigoureusement l’intérêt à croiser les champs disciplinaires. Ce travail sans précédent constitue dès à présent un outil de référence pour les chercheurs et amateurs de musique et de littérature.