Dans son « Panorama des poètes », Françoise Siri met en avant une trentaine d’auteurs francophones et souligne le dynamisme de la poésie contemporaine.

À l’occasion du « Printemps des poètes »   , la « journaliste et “passeuse” de poésie » Françoise Siri publie Le Panorama des poètes. Enquête sur la poésie francophone du XXIe siècle. Elle renoue là avec une tradition fort ancienne, qui vise à présenter à une époque donnée un aperçu du cœur de la création poétique contemporaine.

L’ouvrage, qui se présente comme une porte d’entrée vers la poésie, se veut accessible à toutes et à tous. Il est composé d’un choix de textes d’une trentaine de poètes francophones (trente-trois exactement), précédés d’une courte biographie, ainsi que d’un entretien de l’auteur avec lesdits « poètes ». L’auteur propose également une courte introduction, sorte « d’enquête embryonnaire »   sur le milieu de la poésie francophone actuelle. Elle évoque avec enthousiasme les multiples prix et festivals de poésie et surtout la grande vitalité de l’édition dans ce domaine, puisqu’elle compte plusieurs centaines d’éditeurs. Jean-Pierre Siméon, qui signe l’avant-propos de l’ouvrage, donne d’ailleurs le ton en rappelant que « les poètes sont ici et maintenant bien présents dans la cité »   .

Par définition, la publication d’un Panorama résulte d’un choix subjectif. L’ensemble apparaît de facto inégal – des poèmes d’une force certaine voisinent avec des textes plus attendus. Bien qu’elle cherche à équilibrer la présence de « grands anciens » et de poètes plus jeunes, ainsi que d’auteurs de tous les territoires francophones, les choix de Françoise Siri semblent guidés avant tout par ses propres passions. L’ensemble de la sélection révèle une lecture relativement classique de la forme poétique, bien qu’elle s’ouvre à des écritures plus expérimentales, avec des poèmes de Pauline Catherinot qui « est peut-être l’héritière des poètes sonores »   .

On compte donc plusieurs figures de grands anciens, figures marquantes de la vie poétique depuis les années 1970. Certaines étonnent dans un panorama consacré à la poésie contemporaine, notamment la présence de Georges-Emmanuel Clancier. Cependant, on a plaisir à suivre les pérégrinations poétiques de Silvia Baron Supervielle   , et à écouter Matthieu Chédid parler de sa grand-mère, Andrée Chédid. Jacques Roubaud rappelle ses recherches érudites dans les bibliothèques et Guy Goffette ses rituels d’écritures.

Les pages consacrées à Claude Beausoleil sont pleines d’enthousiasme : ce poète québécois fait preuve d’une forme d’optimisme suffisamment rare pour qu’on la souligne. Il rappelle ainsi que lors des grèves étudiantes au Québec en 2012, la forme poétique était partout présente dans les rues, via le vers du poète Gaston Miron : « Nous sommes les bêtes féroces de l’espoir », affiché et repris tout au long du mouvement   .

On relit avec un certain enthousiasme les mots de Linda Maria Baros et ceux de Bernard Chambaz, inspirés d’une visite dans un musée de sciences naturelles. On découvre également la finesse du regard de Jeanine Baude.

Nous devons cependant faire part de deux regrets : les bibliographies des poètes d’abord. Celles-ci auraient pu être plus étoffées pour renvoyer le lecteur à un plus large choix de recueils. Ensuite, certains poèmes semblent coupés dans le corps même du texte – vraisemblablement pour des questions formelles, mais cela est parfois un peu gênant.

Ne cachons pas cependant le plaisir de la lecture : on ne peut que saluer cette entreprise qui donne la parole aux poètes, et rappelle, par la variété et la surprise des choix, par les manques mêmes, que la forme poétique existe bien dans la scène littéraire francophone. Ce livre est une ouverture sur la poésie contemporaine particulièrement pour des lecteurs encore peu familiers de ce genre