L’édition 2010 du Sidaction a rapporté 5,2 millions d’euros, une somme en baisse par rapport à 2009. En cause, la crise économique d’une part, mais aussi la polémique du directeur du Sidaction, Pierre Bergé, qui avait accusé le Téléthon de "parasiter la générosité des Français".

La compétition entre les maladies pour l’allocation de ressources est "un phénomène qui n’est ni surprenant, ni nouveau" rappelle Gaëlle Krikorian dans un article publié par la revue Vacarme. Prenant l’exemple de la lutte contre le sida dans les pays en développement, elle met en lumière le fait qu’il s’agit d’un faux problème. A la fin des années 90, les tensions se cristallisaient autour de la question de l’accès aux traitements antirétroviraux. Il s’agissait pour la Banque mondiale et la Commission européenne, principaux financeurs de la lutte contre le sida, d’une revendication "utopique" et "démagogique" et beaucoup pensaient que la lutte contre le sida dans les pays en développement se ferait au détriment de la lutte contre la tuberculose, la malaria, etc. Finalement adopté, l’accès aux antirétroviraux, qui est devenu en une décennie un axe prioritaire pour les institutions internationales, aurait même eu des effets positifs sur l’aide financière aux autres maladies. Des chercheurs du programme de la Banque mondiale contre le sida, des universitaires de Columbia ainsi que Médecins sans frontières (MSF) ont tous souligné la contribution de la lutte contre le sida à l’amélioration de l’accès aux soins pour d’autres maladies dans les pays en développement.

Malgré ce succès, la remise en cause de la lutte contre le sida, sous des prétextes divers revient, lancinante. Certains soulignent que la lutte contre le sida est passé de 5,5% de l’aide à la santé en 1998 à 50% en 2007, lui reprochant de s’être "taillé la part du lion"… et oubliant par la même occasion que sur la même période, les financements dédiés à la santé auraient triplés. Il y a donc eu un effet d’entraînement. D’autres, comme l’épidémiologiste Daniel Halperin, réactive les anciens clivages entre maladies en déclarant que "même la tuberculose et la malaria obtiennent bien moins d’argent que le sida." Face à ces critiques, 87 organisations ont lancé une campagne contre le désengagement des Etats avec ce slogan qui résume bien la situation : "le sida n’est pas sur-financé : la santé est sous-financée." Et l’auteure de rappeler que "si quatre millions de séropositifs suivent actuellement un traitement antirétroviral dans les pays en développement, six millions de personnes qui en auraient besoin n’y ont pas accès."

En fait, la tendance à la hausse dans la lutte contre le sida semble s’inverser. En France, par exemple, les aides publiques auraient diminués entre 2009 et 2010 et la Cour des comptes, dans un rapport sur le sida du 9 février 2010, s’inquiète du désengagement de l’Etat dans la prévention, le dépistage et les politiques de lutte contre le sida. De plus, l’accord ACTA sur les contrefaçons (de l’anglais Anti-Counterfeinting Trade Agreement), qui a fait l’objet de fuites malgré des négociations secrètes depuis 2008, ferait peser une menace sur la circulation et l’approvisionnement en médicaments génériques pour les pays en développement. Or, avec un total de 33,4 millions de personnes vivants avec le VIH dans le monde en 2008 – soit 20% de plus qu’en 2000 -, la lutte contre l’épidémie du sida reste toujours d’actualité