Dans le cadre des déjeuners-conférences du Mouvement européen – France organisés au Sénat, le député européen Alain Lamassoure   a présenté son rapport intitulé "Le citoyen et l’application du droit communautaire", remis le 27 juin dernier au président Nicolas Sarkozy.

Le rapport part du point d’arrivée, c'est-à-dire en considérant l’intégration européenne comme un fait acquis. Il s’agit de voir comment le droit communautaire existant est mis en œuvre au concret. Alain Lamassoure a pu, tout au long de son parcours professionnel et politique, faire une série de constatations, dont notamment celle de l’ "autosatisfaction" du Parlement européen. Celui-ci, une fois la norme communautaire édictée, se reposerait sur l’impression agréable, mais fallacieuse, du travail bien accompli. Quid de l’effectivité du droit communautaire ? L’eurodéputé évoque l’angoisse de la découverte de la réalité du terrain. Erasmus, un programme génial ? Oui, mais n’oublions pas les difficultés administratives parfois aberrantes que rencontrent les étudiants. La mobilité des citoyens européens, une révolution de l’État-nation ? Peut-être, mais savez-vous que 85 %  des citoyens européens ignorent qu’ils sont des… citoyens européens ? qu’il y a en France deux fois plus d’étudiants étrangers venant d’un pays hors UE que ceux venant d’un autre État membre, de même pour les travailleurs étrangers ? que 36 % ne savent pas qu’ils élisent le Parlement européen, qu’ils ne se rappellent plus pour quel eurodéputé ils ont voté, et, summum de l’effroi, qu’ils ne se souviennent même plus d’avoir voté à des élections européennes ? Besancenot, Mélenchon et Emmanuelli se tromperaient donc de combat.

Alain Lamassoure, en chrétien-démocrate, insiste sur la nécessité de renforcer les mariages intra-communautaires. Les Anglaises préféreraient les Russes aux Français : l’Europe des citoyens ne marche pas. La solution : l’impulsion politique au plus haut niveau, c'est-à-dire au Conseil européen. C’est là précisément que le rapport Lamassoure laisse perplexe. Celui-ci constate l’échec de la mise en œuvre concrète du droit communautaire, mais propose comme solution in fine un recours accru au droit communautaire et à la "méthode communautaire"   . La pertinence de cette dernière est pourtant aujourd’hui mise en doute dans une Europe à vingt-sept qui implique des disparités de cultures juridiques sans commune mesure avec celles du temps de l’Europe à quinze. L’approche d’Alain Lamassoure demeure ancrée dans une logique verticale et politique de l’Europe (la solution passe par le sommet) alors que celle-ci se construit sur le mode de la gouvernance qui se caractérise par l’informalité et l’enchevêtrement des niveaux décisionnels et qui confère un rôle majeur aux acteurs privés et aux juges. Autosatisfaction du politique diagnostiquée, mais pas encore soignée ?

 

* À lire également :

- le rapport "Le citoyen et l’application du droit communautaire"

- le blog d’Alain Lamassoure.