Dans un article publié ce jour dans Libération on pourra lire un intéressant plaidoyer de Philippe Lançon pour l'écrivain Georges Bernanos, auquel s'en sont pris récemment Jean-Paul Enthoven et Alexandre Adler ("héroïques chasseurs mondains d'antisémites") en le présentant, selon le journaliste passionné, comme la "bonne à tout faire de l’antisémitisme". De quoi s'agit-il ? Tout simplement de ne pas ramener l'existence d'un homme à quelques phrases (notamment celle-ci : "Ce mot [antisémite] me fait de plus en plus horreur, Hitler l’a déshonoré à jamais."). Car en effet, "Rien n’est donc plus aisé - ni plus vain - que de le condamner soixante-quatre ans plus tard. Il suffit d’oublier l’essentiel : la masse des autres articles, de ses essais, le sens général de son combat antivichyssois et antitotalitaire ; de réduire, en somme, la vie d’un écrivain mort en 1948 à quelques phrases, sans chercher à expliquer d’où elles viennent - non pour les justifier, mais pour le comprendre, lui." Voilà donc à quoi s'attache, dans ce texte, l'admirateur de Bernanos qui a aussi cette phrase : "Il abandonna l’art romanesque pour mener, essais après articles, sa lutte contre la dégradation française et l’Europe fasciste. Il le fit selon sa perspective catholique, royaliste, antiprogressiste ; mais il le fit absolument." On ne rajoutera à son propos qu'un conseil de lecture : l'incisif et bouleversant Scandale de la vérité, paru en 1939 chez Gallimard

 

 * Philippe Lançon, "Bernanos et les bien-pensants", Libération, 02.09.2008