Atelier n°4 : Le contrat de l’auteur pour le livre numérique
[mercredi 09 janvier 2013 - 22:00]

Dans la matinée, s’est également tenu un atelier animé par Frédéric Martel (nonfiction.fr) et portant sur "Le contrat de l’auteur pour le livre numérique". La parole est dans un premier temps donnée à Stéphane Bureau, responsable d’édition en charge du numérique aux éditions Armand Colin. Pour celui-ci, la nouvelle politique de numérisation induite par le développement de la lecture numérique repose la question délicate du droit d’auteur en France. La notion de propriété de l’œuvre doit-elle être révisée ?

Si l’œuvre et son auteur restent protégés grâce à la distinction faite entre droits moraux et droits patrimoniaux, il est cependant nécessaire, pour Stéphane Bureau, de repenser la position des auteurs. Avis que partage Sébastien Célimon, directeur du développement numérique aux éditions Glénat : il ne peut y avoir de consensus sur la question du droit d’auteur car c’est l’auteur qui se trouve "à la racine de tout". Or, Sébastien Célimon souligne la paupérisation croissante des auteurs de bande-dessinée : ceux-ci ont de plus en plus de mal à vivre de leurs travaux et, de fait, les éditeurs aussi. La question des droits numériques s’ajoute donc à une crainte initiale des auteurs : celle de ne plus pouvoir vivre de leur art. Il est donc nécessaire de tenir compte d’une "juste rétribution" entre auteur, éditeur et lecteur dans les contrats numériques. A ce propos, Sébastien Célimon évoque la politique de rémunération des auteurs adoptée par Glénat : les droits numériques sont indexés sur ceux des droits papiers et les auteurs rétribués à hauteur de 12%. Cependant, une nouvelle difficulté se pose pour l’auteur, formulée par Dominique Greusard, éditeur du Bas Vénitien. Peu importe finalement pour l’auteur le pourcentage qui lui est attribué par le contrat numérique, c’est "ce que celui-ci va lui rapporter" qui l’intéresse.

Il y a donc ici une inversion des rapports de force entre auteur et éditeur qui, autrefois, faisaient montre d’une certaine solidarité. Désormais, l’éditeur doit, non seulement intégrer ce que veulent les lecteurs, mais aussi les auteurs. Si Stéphane Bureau (Armand Colin) ne constate pour sa part "aucune opposition entre éditeurs et auteurs", Frédéric Martel émet un avis tranché sur la rétribution de ces derniers. Il est primordial que les auteurs soient désormais rémunérés pour les conférences auxquelles ils participent, comme c’est le cas aux Etats-Unis. Les maisons d’édition doivent en effet accompagner les auteurs et apporter de la valeur ajoutée à l’œuvre papier et numérique pour que celle-ci ne soit pas dévaluée. Il est du ressort de l’éditeur d’assurer la plus grande visibilité possible de l’œuvre qui lui est confiée, par sa commercialisation sous formats papier et numérique, mais aussi par la vente des droits à l’étranger. Quant aux auteurs, il est essentiel qu’ils s’approprient les modalités de l’écriture numérique et les nouveaux modes de diffusion afin que leur œuvre leur reste propre.

Enfin, a été abordée la question de l’interactivité de l’œuvre numérique et de son enrichissement constant. Les mises à jour permanentes, corrections, ajouts de notes et de chapitres démultiplient les auteurs de l’œuvre numérique. La question d’une révision des droits moraux et patrimoniaux se pose donc. L’atelier s’est achevé sur une constatation peu encourageante pour les auteurs : si l’enrichissement du livre numérique augmente le nombre d’auteurs, ceux-ci devront nécessairement revoir leurs droits à la baisse pour que le livre reste accessible, alors que les droits de production sont, eux, de plus en plus élevés.

 

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rédacteur : Charlotte ARCE, Secrétaire de rédaction