*Russie 2013 : Regards de l’Observatoire franco-russe, Editions du Cherche-midi, mai 2013, 95 €.

Un an après sa création au sein de la Chambre de Commerce et d’Industrie franco-russe, l’Observatoire franco-russe publie en 2013 son premier rapport annuel. La Chambre de Commerce et d’Industrie franco-russe est issue du "Club France" : créé à Moscou en 1997, le Club France a rejoint en 2006 l’Union des Chambres de Commerce et d’Industrie Françaises à l’Etranger, réseau privé d'entreprises françaises. La mise en place de l’Observatoire poursuit le développement de cette organisation dans un pays au marché très convoité, y compris par les entreprises françaises.

Ce rapport annuel est donc destiné avant tout aux acteurs économiques français sur la Russie, et a l’ambition d’allier rigueur universitaire et aspect utilitaire   . Il est organisé en rubriques consacrées à l’économie, la société et la politique intérieure, aux régions et à la politique étrangère ; s’y ajoutent des "miscellanées franco-russes". Les auteurs des articles sont majoritairement des universitaires français et russes ; on trouve également d’autres personnalités, issues du monde des affaires dans la rubrique sur l’économie ou responsables de centres d’observation de la Russie dans celle sur la société, ce qui permet d’offrir une variété de points de vue enrichissante.

Les travaux présentés permettent donc de porter un regard approfondi et nuancé sur les sujets d’actualité ; des articles de synthèse alternant avec des points sur des sujets plus précis proposent des analyses qui vont parfois à l’encontre des idées reçues. Par exemple, la partie sur l’économie montre que, si le secteur énergétique est très important dans le cadre de la politique budgétaire (il génère la moitié des recettes de l'Etat), il représente moins de 15% de la valeur ajoutée nationale, derrière la distribution ou l'industrie manufacturière ; par ailleurs, l'économie russe est beaucoup plus tertiarisée que l'on ne croit généralement. Cela ne doit pas faire oublier la persistance de problèmes réels, comme la faiblesse du secteur financier ou la nécessité d’une réforme du système des retraites. La partie sociétale, quant à elle, propose une réflexion sur la nature et les suites de la contestation de 2011 : selon les auteurs, il faut se garder d’une comparaison trop rapide avec le "printemps arabe" ou de qualifier trop vite les manifestants de "classe moyenne" ; L. Goudkov rappelle que Vladimir Poutine continue de bénéficier du soutien d’une grande partie de la population, surtout celle de ce qu’il appelle "la Russie industrielle". Sur le plan stratégique, plusieurs articles mettent en évidence la force des liens entre les pays de l’Union Européenne et la Russie, que ce soit sur le plan économique ou culturel.

L’ouvrage a les défauts de ses qualités : centré sur l’actualité, il met bien en lumière certains sujets, mais ne traite pas de façon exhaustive les thématiques abordées. Ainsi, la rubrique "régions" comprend trois articles sur le projet urbanistique, qui a fait couler beaucoup d’encre, du "Grand Moscou", deux sur le Caucase du Nord, qui reste une région sensible, un sur l’Extrême-Orient et un sur l’évolution de l’islam au Tatarstan, mais aucun sur le Nord, la Russie centrale ou la Sibérie occidentale. Par ailleurs, la partie sur l’économie traite peu du rôle des différents acteurs, notamment les entreprises. Les "miscellanées" proposent des articles très variés, parfois fort instructifs mais mal rattachés les uns aux autres.
L’approche choisie par l’Observatoire franco-russe, une analyse de l’actualité à mi-chemin entre recherche et travail de vulgarisation destiné aux acteurs économiques, est intéressante et mérite qu’on suive les activités de ce nouvel organisme