Dans le rapport 2009 d’Amnesty International, Irène Kahn, secrétaire générale de l’ONG, met en évidence un fossé, un paradoxe, une injustice : D'un côté, les moyens alloués par les gouvernements pour enrayer la crise économique ; de l'autre, leurs réticences depuis des années pour lutter contre la pauvreté, et plus récemment, pour atteindre les "Objectifs du millénaire".

Cette contradiction étant posée, ses conséquences sont poussée jusqu'au constat prospectif étayé par les chiffres du rapport : "La récession économique est propice à un certain nombre de facteurs, dont la convergence risque de se traduire par une augmentation du nombre d’êtres humains vivant dans la pauvreté et dont les droits fondamentaux sont bafoués." Amnesty International, créé il y a une cinquantaine d'années pour libérer les prisonniers d'opinion, défend aujourd'hui les "prisonniers de la pauvreté". Le rapport 2009 rencense par région et par pays la situation des droits humains dans 157 territoires en 2008. Il met l'accent sur l'extension de la pauvreté dans le monde, tout en reliant la récession économique à la répression politique, et inversement. Non seulement la crise économique conduit à bafouer les droits humains dans le monde et à restreindre l'espace d'expression de la société civile, mais encore, l'instabilité politique interdit la reprise économique. Et de développer les exemples à Gaza, en Somalie, en République démocratique du Congo, en Afghanistan...

Pour remédier à cette "crise des droits humains", Amnesty International lance un appel en faveur d’une nouvelle donne mondiale : "Le monde a besoin de principes de gouvernance, de politique et d’économie d’un nouveau type – un système qui fonctionne pour tous ses habitants et pas seulement pour quelques privilégiés." Au-delà de la diatribe contre les conséquences dramatiques des politiques d'ajustement sutrcturel menées par le FMI et de la stigmatisation de l'insécurité alimentaire, le rapport d'Amnesty utilise la gestion de la crise économique par les gouvernements pour défendre la création d'un "New deal pour les droits humains". La crise économique permettrait de reconstruire sur de nouvelles bases l'équilibre mondial, plus attentif aux droits humains, sous tous leurs aspects : liberté d'expression et respect de la Déclaration universelle des droits de l'homme (la libération des prisonniers d'opinion, l'abolition de la peine de mort et de la torture et l'arrêt des crimes politiques sont des combats historiques d'Amnesty), mais aussi droits à la nourriture, au logement décent, aux soins, à l'éducation, à l'égalité entre les hommes et les femmes...